LE COMPTE PERSONNEL D’ACTIVITÉ : GRANDE RÉFORME SOCIALE ?

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Voilà quelques mois, le gouvernement  annonçait la future mise en place d’un compte personnel d’activité. François Hollande l’a présenté en avril comme « la grande réforme sociale du quinquennat ».

L’un des objectifs de ce compte est de permettre à un salarié de conserver ses droits lorsqu’il change d’emploi ou de région. La date d’entrée en vigueur du compte personnel d’activité est ainsi fixée au 1er janvier 2017.

Entre-temps, les modalités de mise en place de ce nouveau dispositif doivent encore être définies, en concertation avec les partenaires sociaux. Ces discussions aboutiront à une loi qui doit normalement être publiée en 2016.

 

Un contour assez flou pour l’instant …

Dans la présentation faite par les pouvoirs publics le dispositif est assez vague. Le rapport de France Stratégie -demandé par le gouvernement – permet de mieux en cerner les contours :

  • Le dispositif doit s’appliquer à l’ensemble des actifs : salariés du privé, fonctionnaires, indépendants…
  • Il a vocation à fusionner le compte personnel de formation, le compte épargne temps et le compte personnel de prévention de la pénibilité.
  • Ouvert dès l’âge de 16 ans, il suit le travailleur tout au long de sa vie professionnelle et stocke les droits que celui-ci a capitalisés, à travers un système de points. Avec une telle unité de mesure, des droits à l’assurance-chômage pourraient, par exemple, être convertis en heures de formation.

 

De sérieuses réserves émises sur le CPA…

Si la communication gouvernementale et institutionnelle est au dithyrambe, certaines voix plus critiques se font entendre.

Le CPA permet effectivement de faciliter les transitions professionnelles en faisant du parcours d’emplois  le support des droits. Toutefois et c’est la critique majeure, le CPA continue de lier les droits des personnes à leurs emplois passés ou présents. De ce point de vue, le modèle du compte par points des droits sociaux n’est pas neutre car sa logique contributive reproduit les inégalités face à l’emploi.

Tant que l’ouverture des droits sera conçue sur le modèle de l’épargne, l’emploi restera l’origine mais aussi l’objectif du droit. Et ce dernier restera soumis à la subordination aux employeurs, relayés par les intermédiaires du marché du travail et les représentants patronaux dans les instances de gestion des dispositifs de sécurisation des parcours professionnels.

Certains chercheurs et syndicalistes s’appuient sur l’expérience de la Sécurité sociale dont nous fêtons le 70e anniversaire :

« La Sécurité sociale en 1945 a précisément attribuer des droits sociaux à la personne déconnectés de l’emploi, ce que les réformes remettent en cause en liant toujours plus cotisations passées et niveau de prestation. A rebours de la logique contributive du CPA,  la situation des personnes (âge, maladie, enfants, etc.) dans la « Sécu », ouvre droit à un salaire de remplacement, à une prestation forfaitaire ou un remboursement. Tirons une leçon de cette histoire et étendons ses réussites : la condition pour offrir un droit à la carrière véritablement attaché à la personne c’est, à l’inverse du CPA, de déconnecter les droits sociaux de l’emploi. La version la plus aboutie d’un tel projet serait l’attribution d’un salaire à vie comme un droit civique. Mais il est possible d’imaginer des modalités intermédiaires : attribution d’un nombre de jours de formation par an sur le modèle des congés payés ; bilan sur les besoins en formation avec un tiers indépendant (dans le cadre d’un service public de l’emploi renouvelé dans ses missions) ; salaire étudiant pendant la durée des études en remplacement des aides et bourses existantes, etc. – qui au lieu de nous soumettre aux exigences des employeurs, permettraient de nous en émanciper ».

 

Vaste débat

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