LA RÉVOLUTION NUMÉRIQUE DANS LES BANQUES : DU RÊVE À LA RÉALITÉ …

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Définition du numérique et enjeux dans les banques…

Chacun dispose d’une définition plus ou moins claire du numérique. Pour certains il se cantonne aux outils (tablettes, smartphones, etc.), et aux nouvelles technologies en particulier. Pour d’autres, le numérique se réfère à l’inverse plus aux usages qu’on en fait et aux changements culturels et organisationnels qu’il sous-entend.

Pour d’autres encore, digital et numérique ne font qu’un, le premier n’étant que la version anglaise du second.

L’explosion de l’accès à internet dans le monde a permis aux internautes de s’approprier ces nouveaux outils pour s’exprimer et se regrouper sous formes de communautés.

Les utilisateurs d’internet sont passés de 150 000 en 1995 à 26 millions en 2005 en France. Le nombre d’abonnés a quadruplé entre début 2000 (3,1 millions) et fin 2005 (13,1 millions).

Son développement tant dans la sphère privée que dans les entreprises bouleverse également les rapports entre une entreprise et ses clients. On comprend pourquoi la transformation numérique figure parmi les sujets les plus brûlants pour les entreprises. Il convient ici d’en déterminer les impacts sur la banque en particulier.

 

Dans les banques, la bataille du big data…

Dans le monde de l’entreprise, le big data permet notamment, grâce à l’analyse et au croisement de données structurées et non structurées (publications sur les réseaux sociaux, emails, etc.) de disposer d’une connaissance beaucoup plus fine des clients et, partant, de leur proposer le « bon produit ou service au bon moment » via le bon canal de distribution. S’il est un secteur au sein duquel le big data pourrait faire merveille, c’est bien celui de la banque. D’abord parce que les établissements bancaires regorgent de données sur leurs clients. Paiements par cartes, retraits d’argent aux distributeurs, et maintenant consultations frénétiques de son compte bancaire via son smartphone… il ne se passe pas un jour sans qu’un client ne fournisse des informations sur lui-même à sa banque, sans même s’en rendre compte. Ce qui n’est pas le cas pour les assureurs, avec lesquels les clients entrent en contact uniquement en cas de sinistre ou au moment du renouvellement de leur contrat.

BPCE (Banques populaires et Caisses d’Epargne)  n’est pas en reste sur ce sujet. Tout récemment, le groupe a développé un algorithme afin d’améliorer sensiblement le taux de détection du surendettement des clients dans  ses réseaux. Ces travaux de recherche sont menés en collaboration avec l’école d’ingénieurs Telecom ParisTech.

 

Les impacts du numérique sur la banque, les clients et les métiers… 

L’objectif pour les banques est de répondre si ce n’est devancer l’évolution et les comportements des attentes des clients. Ce besoin d’approche individuelle peut être résolue pour les banquiers par l’exploitation du big-data (voir la bataille du big data dans les banques).

Cette transformation appelle une évolution des modèles d’entreprise dits « business model » dans le jargon de nos employeurs. Ces impacts sont multiples :

 

  • Optimiser l’expérience client :

Les banques dont BPCE promeuvent leur marque sur les réseaux sociaux. La marque est mise en avant en lieu et place du conseiller (exit l’ami financier). Les banques dépersonnalisent la relation client presque à son insu.

La qualité du conseil se veut à l’honneur avec la numérisation de l’agence bancaire et la création de nouveaux concepts d’agence. Le client en sera-t-il mieux conseillé ?

Les espaces de vente sont redéfinis comme des espaces de démonstration, plaisir ou divertissement afin de mettre en scène « l’expérience utilisateur » : canapés, grands écrans, tablettes digitales…et cerise sur le gâteau le café !

 

  • Transformation des processus opérationnels :

L’automatisation des processus permet de libérer du temps de travail pour les équipes de Back Office notamment, qui peut être réalloué à des tâches à « plus forte valeur ajoutée ». Elle participe de la baisse des effectifs des back-office Caisse d’épargne et de leur mutualisation (IARD-Titres etc.). Elle s’appuie sur le Lean management (littéralement gestion sans gras) qui met à contribution tous les acteurs afin d’éliminer les gaspillages…et parfois les salariés eux-mêmes. Selon de nombreux rapports sur cette méthode d’organisation du travail, originaire du japon, bonjour le stress et l’obsession de la mesure !

 

  • Recentrer l’individu sur les tâches à forte valeur :

Les opérations les plus courantes ou répétitives sont traitées à distance ou directement en agences à partir d’automates et de tablettes tactiles.

De fait, l’affluence dans les agences ne cesse de décroitre et sert d’alibi à l’optimisation du réseau d’agences dans tous les groupes bancaires. Plusieurs réorganisations de réseaux sont mises en place en caisses d’épargne avec leur cortège d’agences fermées -dans les zones rurales- au profit d’agences dans des zones en fort développement démographique et économique. Des emplois sont partout supprimés. Les zones rurales se désertifient, le service de base n’y est plus assuré.

 

  • Développer la culture digitale de l’entreprise :

Dans un environnement incertain et aussi mouvant que le digital, il faut aller vite sur l’apprentissage et le feedback. Fleurissent donc e-Learning, digital quizz, Mooc afin de voir qui s’en sort et qui devra être accompagné…ou pas. Quid pour ceux ou celles qui éprouvent des difficultés ? le pointage à Pôle emploi ?

 

  • Des métiers qui évoluent…

Les postes d’accueil sont revus à la baisse partout au profit de métiers plus experts (gestion de portefeuille, gestion privée, gestion de fortune, expertise professionnels). Le changement des usages des clients implique enfin une forme de flexibilité et d’adaptabilité de la part du chargé de clientèle particuliers.

Les directeurs d’agence seront mis à contribution afin d’accompagner les collègues. Ils bénéficieront – dixit les directions – d’un pouvoir et d’une autonomie renforcée leur donnant les moyens de piloter au plus près leur agence. Quand on interroge ces personnels, ils ne sont que 12 % à déclarer être enclins à recommander leur métier à leur entourage et se plaignent notamment d’un manque d’autonomie dans la gestion de leurs équipes et la fixation des objectifs ainsi que d’une part croissante des tâches administratives.

 

Des lendemains qui déchantent ?

Le modèle économique du numérique « fluide et connecté » est chanté sur tous les tons par toutes les entreprises. Son but avoué est de s’adapter à la révolution qui est en cours.

Si l’on en croit Daniel Cohen, professeur à l’Ecole normale supérieure et à l’Ecole d’économie de Paris., dans un entretien accordé à Marianne en Décembre 2015, l’idée d’une révolution tant annoncée dont les bienfaits retomberaient sur l’ensemble de la société est un leurre. Il démontre notamment que la classe moyenne n’en bénéficie pas. A la surprise des économistes,   « on découvre que les emplois qui profitent de la révolution numérique sont aux deux bouts de la chaîne. Ceux qui sont tout en haut, dit « créatifs », et tout en bas, en gros les services à la personne, là où les logiciels ne peuvent pas faire le job ».

Résultat, pour tous ceux qui se retrouvent entre ces deux « pôles » comme « le milieu de la distribution, les banques, les assurances, les postes d’ouvrier qualifié ou de secrétariat », une partie des troupes silencieuses de la classe moyenne, il y a un « affaissement de l’emploi» .

Une société qui se polarise socialement, se polarise politiquement », prévient-il.

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